Alain Ducasse représente pour moi le seul "gastro-tycoon" au monde (c'est-à-dire "magnat de la gastronomie" pour ceux que le mot tycoon fait plus penser à 'tit-con qu'autre chose !).
En effet, à l'instar de Joël Robuchon, c'est un chef multi-étoilé au niveau international et surtout un homme d'affaire accompli. Par contre, plus que notre Joël-bon-appétit-bien-sûr, il a su diversifier largement ses activités avec, quand même, toujours la gastronomie et l'intelligence de savoir s'entourer des bonnes personnes en tronc commun.
Ainsi, après les restaurants Ducasse, les auberges Ducasse, les éditions Ducasse, l'école de formation Ducasse ou les arts de la table Ducasse (non, je vous rassure, je ne touche pas un pourcentage sur le nombre de citations de son nom ! ;-)) voici venu le temps du ... chocolat par Ducasse !
Et quand Alain fait, Alain fait parfait. Sa toute nouvelle chocolaterie (ouverte depuis mercredi au 40 rue de la Roquette) a, sur le papier, tout pour être propulsée directement dans le cercle très serré des meilleurs chocolatiers. En effet, associé à Nicolas Berger (son Monsieur Chocolat), il a choisi de torréfier lui-même les fèves de cacao. Ce n'est peut-être qu'un détail pour vous, mais pour lui ça voulait dire beaucoup. En effet, en France, les chocolatiers qui torréfient eux-même leurs fèves se comptent sur les doigts d'une main.
Je passe, vous l'aurez compris, sur la sélection drastique des producteurs, le long process de R&D pour mettre au point les machines, la déco réfléchie pour donner la vue sur le labo et les packagings plus que soignés pour arriver ... aux chocolats !
Pour faire simple, la boutique propose quatre grandes familles de chocolat : les tablettes purs crus, la gamme des pralinés, celle des bonbons de chocolat (avec des ganaches à différents parfums) et celle plus large des gourmandises chocolatées (orangette ou pamplemoussette, noisettes enrobées, ...).
Bon, quite à décevoir mes fans en délire (ça ne fait jamais de mal de rêver !), je n'ai pas (encore) tout goûté mais néanmoins, voici un focus sur deux produits stars de la Manufacture : les tablettes non conchées et les pralinés.
Les tablettes non conchées qu'est-ce que c'est ?
En schématisant, ce sont des tablettes "brutes de décoffrage", c'est à dire qui n'ont pas subi la dernière phase du process habituel.
Conséquence ? Un aspect visuel mat et un peu "rugueux" (vous pouvez voir sur la photo la différence entre une tablette conchée à droite et une non conchée à gauche) mais surtout une hétérogénéité surprenante et plaisante en bouche. En effet, la tablette n'a pas un goût uniforme mais alterne, sous sa texture presque sablonneuse, des notes plus ou moins fortes, suivant le morceau que l'on croque, de sucre, de cacao ou de sel (pour le noir) associées à celle de lait et de caramel (pour le lait). La tentation est donc grande d'en croquer plusieurs carrés pour cerner la totalité du sujet !
Les pralinés qu'est-ce que c'est ?
Non, ça mes petits loulous vous le savez ! Par contre, les pralinés sont ici déclinés avec différentes couvertures (noir et lait), différents parfums (pistache, amande, noisette, noix de coco, cacahuète, ...) et différentes textures (lisse, sablonneuse, ...). Après un sérieux raid sur la boite d'assortiments, le moins que l'on puisse dire c'est que chaque bonbon est fidèle a son intitulé puissance 10 ! Le praliné pistache a un goût intense de pistache non sucrée (limite même salée), le praliné noix de coco est proche du fruit par sa consistance "râpeuse" et son goût à nouveau peu sucré et le praliné cacahuète est aussi très surprenant par son intensité salée (en gros, n'attendez pas des versions miniatures du bounty et du snickers, vous seriez déçu !). Seul le praliné amande/noisette, à la texture onctueuse, a ce soupçon de gourmandise régressive.
Quoi qu'il en soit, on ne peut que remarquer que cette chocolaterie réunit les 5 clés actuelles de tout succès "bostro" (i.e. bourgeois gastronome) qui se respecte :
- une attention portée à l'origine du produit et aux crus
- une dimension manufacture/main de l'homme et transparence sur le process (les grandes baies vitrées) qui rassure
- des produits d'excellente qualité et peu sucrés (voire même surprenamment salés)
- un grand nom de la gastronomie
- des packagings ultra-chiadés
(- et, conséquence de tout ça, des prix plus que gastronom-hic !)
En résumé, tout est parfait de A à Z ou plutôt de C à T (car oui, chocolat prend un "t" à la fin pour ceux qui auraient un petit doute !). Seulement voilà, un proverbe coréen (et oui messieurs dames, ça va chercher loin sur ce blog !) explique que "La perfection est un chemin, non une fin". Or, la fin suprême, qui, pour moi en tout cas et ce n'est là que mon avis personnel, doit être le plaisir de gourmandise, a ici un peu disparu au profit d'une mécanique aux rouages parfaits... (croyez moi, je suis loin d'être une accro au sucre mais là je trouve quand même qu'il en manque un poil pour que cela soit vraiment gourmand !)
Le mot de la faim ?
Willy Wonka, on a besoin de toi !
Edit
Je m'aperçois avec effroi au moment de publier cet article que j'ai, sans en avoir eu conscience, trouvé le même titre que le Elle pour l'article consacré à la chocolaterie. Ceci prouve donc 2 choses :
1) Que mon titre est pas mal si certains en doutaient ! ;-)
2) Que je suis bien une fille élevée au biberon hebdomadaire du Elle depuis des années !